Beardsell, Andréanne (2023). Vers une compréhension mécanistique des interactions indirectes entre les proies de la toundra arctique. Thèse. Montréal, Université du Québec à Montréal, Département de biologie, chimie et géographie, 158 p.
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Résumé
RÉSUMÉ : Comprendre comment et dans quelle mesure les interactions biotiques influencent l'abondance et la distribution des espèces est un défi majeur, notamment car la biodiversité est organisée en réseaux générant des interactions multiples liant les espèces entre elles. C'est d'autant plus difficile lorsque les interactions sont indirectes puisqu'elles peuvent emprunter des parcours complexes dans le réseau d'interactions impliquant plusieurs espèces. Les interactions indirectes, entre des proies partageant un prédateur, peuvent promouvoir la coexistence entre les proies ou dans certains contextes, entraîner l'exclusion locale d'une proie. Ces interactions sont largement répandues en milieu naturel et en dépit d'un nombre élevé de travaux s'y intéressant, il s'avère encore difficile de quantifier la force et déterminer la nature (p.ex., compétition apparente, mutualisme apparent) de l'interaction indirecte résultante entre des proies partageant un prédateur. Cela s'explique particulièrement par la difficulté de définir la réponse fonctionnelle et numérique du prédateur à ses proies. Dans le but d'examiner les mécanismes qui modulent la force des interactions entre les espèces et d'améliorer notre capacité à quantifier la force de ces interactions dans les communautés naturelles, j'ai construit un modèle mécanistique des interactions prédateurs-proies. Ce modèle est basé sur les traits et le comportement des espèces et s'inspire d'une communauté de vertébrés de la toundra arctique, où les petits rongeurs cycliques (lemming) et les œufs d'oiseaux (bécasseaux, oies des neiges) partagent un prédateur (le renard arctique). Le modèle a été paramétré à partir de données issues de la littérature et du suivi écosystémique à long terme (>25 ans) de l'île Bylot (Nunavut). Dans le premier chapitre, un modèle mécanistique de la réponse fonctionnelle du prédateur à quatre de ses proies est dérivé en décomposant la séquence de la prédation (recherche, détection, attaque, capture et manipulation). Ce modèle est l'un des premiers modèles mécanistiques de la réponse fonctionnelle paramétré dans une communauté naturelle de vertébrés. Ce modèle servira de fondation à l'entièreté de la thèse. Dans le second chapitre, les mécanismes pouvant expliquer l'interaction indirecte positive entre des proies de la toundra arctique (les lemmings, les bécasseaux et les passereaux) sont examinés. Les résultats montrent que: (i) contrairement aux hypothèses classiques, le temps de manipulation des proies joue un rôle mineur dans notre système et (ii) des changements dans le comportement du renard (soit dans le budget d'activité quotidien et la distance parcourue) peuvent générer une interaction indirecte positive entre les lemmings et les oiseaux. Dans le dernier chapitre, j'évalue si la présence d'une proie (l'oie des neiges) peut mener à l'exclusion locale d'une autre proie (les bécasseaux) via des interactions trophiques indirectes. Les résultats montrent que les effets positifs de la présence d'une colonie d'oies sur le succès de la nidification des bécasseaux (via le temps de manipulation des œufs par les prédateurs) sont contrebalancés par l'effet négatif d'une augmentation de la densité des renards, causée par une réduction de la taille du domaine vital des renards dans la colonie d'oies. Ainsi, l'interaction nette résultant de la présence des oies était négative et cette interaction est suffisamment forte pour conduire à l'exclusion locale des bécasseaux. L'originalité de ce chapitre est d'identifier les mécanismes proximaux affectant la coexistence des proies dans une communauté naturelle de vertébrés en faisant le pont entre la taille du domaine vital du prédateur, le risque de prédation, jusqu'à la dynamique de populations. Globalement, cette thèse illustre comment des modèles mécanistiques, basés sur des estimations empiriques des principales composantes de la prédation, peuvent améliorer notre capacité à quantifier la force de ces interactions dans les communautés naturelles. Cette thèse a permis d'identifier des mécanismes qui sous-ten ent les interactions indirectes et propose un outil de modélisation pour quantifier les interactions indirectes dans les communautés naturelles. -- Mot(s) clé(s) en français : interactions prédateurs-proies, réponse fonctionnelle, prédation, interactions indirectes, renard arctique (Vulpes lagopus), lemmings, passereaux, bécasseaux. --
ABSTRACT : Understanding how and to what extent biotic interactions influence the abundance and distribution of species is a major challenge, especially since biodiversity is organized in networks generating multiple interactions linking species together. This is particularly challenging when the interactions are indirect, since they can take complex paths through the network of interactions involving several species. Indirect interactions, between prey sharing a predator, can promote coexistence between prey or in some contexts, lead to the local exclusion of a prey. These interactions are widespread in the wild, and despite a large body of research on them, it is still difficult to quantify the strength and determine the nature (e.g. apparent competition, apparent mutualism) of the resulting indirect interaction between prey sharing a predator. This is particularly due to the difficulty of defining the functional and numerical response of the predator to its prey. To examine the mechanisms that modulate the strength of interactions between species and to improve our ability to quantify the strength of these interactions in natural communities, I build a mechanistic model of predator-prey interactions. This model is based on species traits and behavior and was inspired by an Arctic tundra vertebrate community, where small cyclic rodents (lemmings) and bird eggs (sandpipers, snow geese) share a predator (the Arctic fox). The model was parameterized using data from the literature and long-term (>25 years) ecosystem monitoring on Bylot Island, Nunavut. In the first chapter, a mechanistic model of the predator functional response to four of its prey was derived by breaking down the predation sequence (search, detection, attack, capture and manipulation). This model is the one of the first mechanistic model of the functional response parameterized in a natural vertebrate community and highlights that the predator acquisition rate is not systematically limited to the highest prey densities observed in a natural system. This model will be the foundation for the entire thesis. In the second chapter, mechanisms that can explain the positive indirect interaction between Arctic tundra prey (lemmings, sandpipers and passerines) are examined. The results show that: (i) contrary to classical hypotheses, prey handling time plays a minor role in our system and (ii) changes in fox behavior (i.e., in daily activity budget and distance traveled) can generate a positive indirect interaction between lemmings and birds. In the last chapter, I evaluate whether the presence of one prey (snow geese) can lead to the local exclusion of another prey (sandpipers) through indirect trophic interactions. Results show that the positive effects of a goose colony on sandpiper nesting success (due to the handling time of goose eggs by the predator) were outweighed by the negative effect of an increase in fox density. The fox numerical response was driven by changes in home range size. As a result, the net interaction from the presence of geese was negative and could lead to local exclusion of sandpipers. The originality of this chapter is to identify proximal mechanisms affecting prey coexistence in a natural vertebrate community by linking predator home range size, predation risk, and population dynamics. Overall, this thesis illustrates how mechanistic models, based on empirical estimates of key components of predation, can improve our ability to quantify the strength of predator-prey interactions in natural communities. The chapters together make theoretical contributions to ecology through the development and use of novel approaches to quantify predator-prey interactions. -- Mot(s) clé(s) en anglais : predator-prey interactions, functional response, predation, indirect interactions, arctic fox (Vulpes lagopus), lemmings, passerines, sandpipers.
Type de document : | Thèse ou mémoire de l'UQAR (Thèse) |
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Directeur(trice) de mémoire/thèse : | Bêty, Joël |
Co-directeur(s) ou co-directrice(s) de mémoire/thèse : | Gravel, Dominique |
Information complémentaire : | Thèse présentée comme exigence partielle du doctorat en biologie. |
Mots-clés : | Interaction; Prédateurs; Écologie; Arctique; Proies; Prédation (Biologie); Toundras; Renard arctique; Vulpes lagopus; Lemmings; Passériformes; Bécasseaux; Modèle mécanistique. |
Départements et unités départementales : | Département de biologie, chimie et géographie > Biologie |
Déposé par : | DIUQAR UQAR |
Date de dépôt : | 09 nov. 2023 15:28 |
Dernière modification : | 09 nov. 2023 15:28 |
URI : | https://semaphore.uqar.ca/id/eprint/2619 |
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