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Impacts de l'activité humaine en milieu côtier des hautes latitudes : exemple de la station Jubany, Antarctique

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Curtosi, Antonio (2009). Impacts de l'activité humaine en milieu côtier des hautes latitudes : exemple de la station Jubany, Antarctique. Thèse. Rimouski, Québec, Université du Québec à Rimouski, Institut des sciences de la mer de Rimouski, 229 p.

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Résumé

RÉSUMÉ : L'activité humaine a produit dans le passé et continue de le faire à l'heure actuelle,
une grande variété de contaminants environnementaux qui représentent un haut risque pour
la stabilité du biote et de la diversité des écosystèmes. Les écosystèmes polaires sont les
moins atteints de façon directe par l'activité humaine, mais sont par contre les plus sensibles
aux perturbations anthropogéniques. Sur le continent antarctique, qui ne compte aucune
population humaine stable et permanente, la pollution de l'air et la contamination de l'eau
sont causées par des foyers locaux (stations scientifiques et logistiques, activité de pêche et
tourisme) et par le transport aérien global de longue portée, susceptible de mobiliser les
polluants depuis les régions industrialisées du nord jusqu'aux régions aussi lointaines que
l'Antarctique. Il s'avère que les études et monitorages visant à connaître le statut
environnemental de ces régions, ainsi que les sources de pollution par divers composés et
leur dynamique dans l'environnement, demeurent rares. Toujours est-il que cette
connaissance devient essentielle si l'on veut prendre des mesures pour réduire l'impact des
activités locales et en même temps comprendre la persistance et la dynamique de ces
polluants dans l'écosystème.
C'est pour cette raison que nous avons effectué une analyse de la présence des
principaux composés toxiques ayant déjà été rapportés comme polluants des régions
antarctiques: les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) , les métaux lourds, les
composés de butylétain et les biphéniles polychlorés (BPC). Le terrain d'étude choisi est la
base scientifique argentine Jubany. La station est active depuis 52 ans pendant toute l'année
et peut être considérée comme un environnement modèle pour l'évaluation de l'impact
causé par l'activité d'une base antarctique sur l'environnement terrestre et sur le bassin
marin sur la côte duquel est située cette base.
L'analyse des HAP dans des sols et des sédiments pendant deux années consécutives
a indiqué que le secteur d'influence de la base Jubany présente en général un niveau très
faible de pollution par ces composés, dont les HAP à 2 et 3 cycles sont les plus abondants.
Le patron des HAP a montré que les processus locaux de combustion à basse température
sont la principale source de pollution. La distribution verticale de ces polluants dans les sols
a mis en évidence un gradient de concentrations en fonction de la profondeur, avec des
valeurs maximales au niveau de la couche de permafrost, qui diminuent brusquement
ensuite vers l'intérieur de cette couche. Ces résultats ont révélé que le permafrost agit
comme une barrière à faible perméabilité pour la migration vers le bas des HAP. En plus, la
comparaison des concentrations moyennes obtenues dans des sols pendant les deux
périodes d'échantillonnage a mis en évidence une diminution d'un ordre de grandeur entre
l'été 2004 et l'été 2005. Cette diminution a été accompagnée d'une croissance significative
de la concentration de HAP dans des sédiments côtiers (notamment dans les sites
d'échantillonnage 1 et 2 situés dans le secteur interne de l'anse) et corrélée avec un régime
anormalement élevé de précipitations, et suggère que le déplacement des HAP du sol aux
sédiments est dû à un phénomène de lessivage des sols.
Le matériel particulaire en suspension dans l'eau de mer n'a pas présenté de niveaux
significatifs de HAP, sauf dans le secteur de manoeuvre des bateaux, où le profil des HAP a
clairement signalé que leur origine se trouve dans le déversement accidentel de combustible
pour les moteurs. Le biote associé à l'anse a montré des valeurs faibles de HAP, conformes
à leur environnement, quoique le tissu hépatique de Notothenia coriiceps s'est avéré enrichi
en 7, 12-dimetylbenz( a)anthracène. La présence de ce composé cancérogène connu, qui
n'est détecté qu'à des quantités traces dans l'entourage, est un sujet important et sa
concentration, ainsi que son rapport au dommage hépatique chez les poissons antarctiques,
devraient être suivi plus attentivement.
La présence du composé antisalissure tribut yi étain (TBT) ou de ses dérivés mono et
dibutylés, a été décelée de façon sporadique, aussi bien dans des sédiments que chez les
organismes marins qui y sont associés. Si les niveaux trouvés ont été faibles, deux sites sur
les neuf échantillonnés ont pourtant montré des concentrations décelables de TBT. Ces
points correspondent au secteur d'ancrage des brise-glaces et d'autres navires polaires
opérant dans le secteur ou cherchant un abri dans l'anse pendant les fortes tempêtes
antarctiques. Dans cette situation, l'abrasion des glaces flottantes et le détachement de
particules de peinture des coques des navires pourraient être à l'origine de la contamination
au TBT. Cette hypothèse s'est vue confortée par les résultats de TBT dans le biote marin; en
effet, il n'y a eu que quelques individus de Laternula elliptica présentant des niveaux
significatifs de ce polluant, tandis que d'autres individus proches n'ont pas présenté de
concentrations décelables. Les specimen du poisson N. coriiceps et du gastéropode Nacella
concinna, des espèces non associées aux sédiments du secteur affecté, n'ont pas présenté de
traces de TBT ou de ses dérivés.
La présence des différents isomères de BPC n'a pas pu être détectée, ni dans les
sédiments, ni dans les tissus du biote de l'anse. Bien que les travaux préalables mettaient en
évidence un niveau de BPC dans l'Antarctique associé au transport global, ce phénomène
n'a pas pu être validé sur la région étudiée dans le présent travail.
Finalement, l'étude de sept métaux lourds (Fe, Zn, Cu, Mn, Cd, Pb et Cr) a révélé
que, en général, les niveaux de ceux-ci sont notamment affectés par les caractéristiques
géochimiques de la région, l'influence anthropogénique s'avérant peu significative. Dans le
cas des sédiments, les sites 1 et 2 ont montré des niveaux de Pb significativement plus
élevés que les autres et seraient liés à l'activité de la base Jubany. Les niveaux chez le
bivalve L. elliptica ont montré des valeurs hétérogènes selon l'organe analysé; cependant,
une tendance générale avec des niveaux des divers métaux est la suivante :
Fe>Zn>Cu>Mn>Cd>Pb>Cr. Dans le cas du Cr, un seul individu de L. elliptica et un de N.
con cinna ont présenté des niveaux détectables du métal. Ce résultat serait associé
également à un phénomène d'incorporation aléatoire de particules de peinture utilisée pour
l'entretien de la base Jubany, dans la composition de laquelle est inclus le Cr.
En somme, ce travail a mis en évidence que les niveaux de pollution anthropogénique
affectant les alentours de la base Jubany sont très faibles et ne constituent donc pas une
menace environnementale significative. Cependant, plusieurs points importants issus de
cette étude doivent être soulignés: 1) Les caractéristiques océanographiques de la région
d'étude sont déterminantes pour la distribution des polluants; II) Le permafrost constitue
une barrière importante pour la migration verticale de certains polluants, qui tendent à
s'accumuler dans les premiers centimètres de celui-ci; III) Cette distribution des polluants
pourrait être profondément atteinte par les effets locaux du phénomène de réchauffement
mondial, qui pourrait mobiliser une masse impOliante des polluants retenus dans le
permafrost vers le milieu marin côtier environnant, ce qui aurait des retombées écologiques
adverses et imprévisibles; IV) Les caractéristiques géochimiques locales devient le
principal facteur déterminant de la concentration des métaux lourds étudiés; V) Certaines
activités liées au fonctionnement de la base Jubany sont à l'origine de la présence de
niveaux décelables des quelques-uns des polluants étudiés. Les mesures proposées à l'heure
actuelle par la communauté scientifique antarctique internationale et devant être mises en
place sur le continent devraient conduire à réduire l'impact négatif de telles activités dans la
région. -- ABSTRACT : Human activities produced in the past, and are still producing at the present days, a
great variety of environrnental contaminants which represent a high risk for the biota of
diverse ecosystems and could affect their stability. Polar ecosystems are less affected than
others by human activities, but they are also considered among the most sensitive to the
anthropogenic effects. On the Antarctic continent, where no permanent human settlements
are present, air pollution and water contamination are caused by local sources (scientific
stations, fisheries, tourism) and by the global atmospheric transport, which is able to move
the pollutants from northem industrial areas to regions as far as the Antarctica. Studies and
monitoring programs exploring the environrnental status of south polar regions as weIl as
the sources causing the pollution and their dynamics in these severe environrnents are
scarce. However, this knowledge is essential to take decisions and actions to reduce the
impact caused by local activities as weIl as to understand the persistence of these
contaminants in the southem environment.
For these reasons, we carried out an exhaustive analysis about the presence of main
toxic compounds previously reported as relevant Antarctic contaminants such as polycyclic
aromatic hydrocarbons (PARs), heavy metals, butyltin compounds and polychlorinated
biphenyls (PCB). Jubany station (Argentina), the terrestrial area around it and the Potter
Coye basin were selected as the study area. The station has been active during 52 years and
is considered as a model site for the evaluation of the impact that an Antarctic station can
produce on the terrestrial environment and the adjacent marine basin where the station is
located.
Analysis of PARs in soil and sediment during two consecutive years showed that
Jubany station has a low level of contamination with these compounds, the 2 and 3-rings
PARs being the most abUfidant ones. The pattern of PAR evidenced that the local process
of low-temperature combustion as the main contamination source. Vertical distribution of
P ARs in soil showed a significant gradient, with values increasing with depth until the
permafrost table and decreasing from the table to the interior of permafrost layer. These
results revealed that the upper layer of the permafrost acts as a barrier for downward PARs
migration. In addition, PAR concentrations in soils from the two sampling programs
showed a decrease by one order of magnitude in 2005 compared with values obtained in
2004. Such a decrease was accompanied by a concomitant increase of PAR concentrations
in coastal marine sediment (mainly in sampling sites 1 and 2 located in the inner part of the
coye) and also correlated with an unusual high precipitation regime, suggesting that an
important washout of soil PAR occurred during the time interval between samplings.
The suspended particulate matter (SPM) in seawater showed no detectable levels of
PARs, with exception of an area close to the boats wharf where the pattern of PARs
evidenced the influence of recent fuel spills. Biota associated to the coye evidenced PAR
concentrations in accordance with their environment. However, the liver tissue from
Notothenia coriiceps turned to be enriched in 7,12-dimethylbenz(a)anthracene. The
presence of this known carcinogenic compound, which was only detected as traces in the
environment, represents a relevant point and its hepatic concentration as weil as its
correlation with hepatic damage in Antarctic fishes should be deeply investigated in the
future.
The presence of the antifouling compound tributyltin (TBT) and/or their derivatives
mono and dibutylated tins was detected heterogeneously either in sediment samples or in
the associated marine organisms. Although measured levels were low, 2 of 9 sampled sites
showed detectable concentrations of TBT. These sites are located in the area where the ice
breakers and other polar vessels operate or are searching for refuge during strong Antarctic
storms. In this situation the abrasion produced by the floating ice pieces could cause a
detaching of paint particles which rapidly sediment and accumulate in the basin of the coye
causing the observed heterogeneous distribution. This hypothesis was reinforced by the
results obtained from the biota. In this sense, whereas sorne Laternula elliptica specimens
showed significant levels of the contaminant, other specimens from the same are a showed
no detectable amount of TBT. Samples from the fish N. coriiceps and the gastropod
Nacella concinna (which are not associated to the sediments of the affected area), did not
show detectable levels ofTBT.
The presence of different PCB congeners cannot be detected, neither in sediments
samples nor in tissue samples from the biota associated to the COYe. Although previous
works reported the presence of detectable levels of PCB in the Antarctica which was
attributed to the global transport, the presence of such a phenomenon can not be confirmed
for the studied area.
Finally, the analysis of 7 different heavy metals (Fe, Zn, Cu, Mn, Cd, Pb and Cr)
showed that, in a general view, concentrations are mainly affected by the geochemical
characteristics of the area, the anthropogenic influence being negligible. In sediment
samples, as previously mentioned for PARs, sampling sites 1 and 2 showed significantly
higher concentrations of lead (Pb) that would be related to the human activity at Jubany
station. Levels of heavy metals analyzed in the bivalve L. elliptica showed heterogeneous
results depending to the studied organ. However, a general tendency, with levels of
Fe>Zn>Cu>Mn>Cd>Pb>Cr was observed. Only one L. elliptica specimen and one N.
concinna specimen showed detectable levels of Cr. This result should also be related to the
at random intake by these organisms of the paint particles used in the maintenance of
Jubany station, in which formulation the Cr is inc1uded.
In conclusion, this work showed that the levels of anthropogenic contamination
affecting the surroundings of Jubany station are low and do not represent any significant
environmental risk. However, several relevant points that emerge from this study must be
noted : 1) the oceanographic characteristics of the studied area are a determinant factor for
the contaminants distribution. II) The permafrost layer proves to be a relevant barrier to the
downward migration of certain contaminants, which tend to accumulate in the first cm of
the permafrost table. III) This spatial distribution of contaminants in soils could be deeply
affected by the local effects of the global warming, which could move a significant amount
of organic contaminants, initially retained in the permafrost, to the coastal marine
environment with adverse and unpredictable ecological consequences. IV) The local
geochemical characteristics represent the main factor determining the concentration of
analyzed heavy metals. V) A number of activities related to the operation of Jubany station
are responsible of the detectable levels of some of the studied contaminants. Regulations
currently proposed by the international Antarctic scientific community for their application
in the continent should minimize the negative impacts expected from these activities.

Type de document : Thèse ou mémoire de l'UQAR (Thèse)
Directeur(trice) de mémoire/thèse : Pelletier, Émilien et Memolli, Mariano et Marenssi, Sergio
Co-directeur(s) ou co-directrice(s) de mémoire/thèse : Mac Cormak, Walter
Information complémentaire : Thèse présentée à l'Université du Québec à Rimouski comme exigence partielle du programme de doctorat conjoint en océanographie pour l'obtention du grade de Philosophiae Doctor (océanographie). Publié aussi en version papier.
Mots-clés : Pollution Polluant Contamination Contaminant Toxicite Effet Impact Activite Homme Humain Anthropogenique Environnement Ecosysteme Polaire Terrestre Marin Cotier Station Jubany Antarctique
Départements et unités départementales : Institut des sciences de la mer de Rimouski (ISMER) > Océanographie
Déposé par : DIUQAR UQAR
Date de dépôt : 07 févr. 2011 17:07
Dernière modification : 07 févr. 2011 17:07
URI : https://semaphore.uqar.ca/id/eprint/137

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